Publié le Mars 20, 2024Mis à jour le Septembre 10, 2024
Avec ses 400 boutiques disséminées partout dans le monde, APM Monaco fait resplendir l’identité et les valeurs monégasques à l’international à travers une vision originale de la bijouterie, intimement liée à la mode et aux dernières tendances. Rencontre avec Kika Prette, authentique visionnaire et directrice de la création des bijoux APM Monaco.
Le luxe, de la joaillerie et de la mode selon APM Monaco ?
Kika Prette : Dans la mode, on trouve toute une palette de choix, qui s’étendent du luxe à ce qu'on appelle aujourd'hui la fast fashion, par exemple, avec énormément de propositions contemporaines, à tous les niveaux de prix et de qualité... Bref, un très large éventail. Or, dans le bijou, je ne retrouvais pas du tout cela : cette diversité, cette évolution des tendances, ce côté « mode ». C'était vraiment juste « le bijou pour une occasion ». Le concept de la marque a donc mûri autour de cela. Et c’est son positionnement aujourd'hui : beaucoup plus proche de la mode que du bijou traditionnel. D'où le fait d'avoir des collections récurrentes, ou qui viennent se greffer sur une thématique.
Comment abordez-vous cet aspect de vos collections ?
Kika Prette : Toutes nos collections possèdent une thématique. Playlist en magasin, décoration des boutiques, égéries, réalisation : on imagine un univers pour créer de l’harmonie.
Un exemple ?
Kika Prette : Si l’on travaille sur une thématique « rock », on va réfléchir à une collection qui corresponde à cette esthétique, à cette culture, à travers des designs un peu plus pointus, des bijoux avec du noir, du gris, des patterns plus rock. Ensuite, on va se poser la question de l’égérie qu’on imagine sur cette collection, puis passer à l’étape de création autour du shooting, autour des visuels pour la communication. Et enfin, donc, à la musique qui va passer en boutique, et c’est cet ensemble qui va être relayé sur tous les réseaux sociaux, sur YouTube... En somme, cela forme vraiment une campagne entière, qu'on livre du début jusqu'à la fin.
Cette façon de reprendre les codes de la mode pour les appliquer au monde de la joaillerie, le secret de votre success story ?
Kika Prette : Un secret qui a déjà été dévoilé plein de fois [rires] ! C'est le concept profond de la marque et c'est ce qu’on a pu apporter dans le monde du bijou. C'est notre ADN. Tout comme notre appartenance monégasque, par exemple.
Monaco fait partie intégrante de votre identité ?
Kika Prette : Bien entendu ! Personnellement, j'ai grandi à Monaco et la Principauté représente les valeurs fondamentales de la marque, celles qu'on veut transmettre, ici comme à l'étranger. Au niveau des boutiques, cela se traduit par l’utilisation du bois, du teck, du bleu marine, avec des finitions qui évoquent le sud de la France. De même, une grande majorité de nos campagnes sont shootées à Monaco : que ce soit à travers elles, ou à travers nos égéries ou nos collaborations, on conserve naturellement cet ADN. Même en termes de collections, on a des collections « Yacht-Club », des clins d’œil à Monaco... Il y a toujours un lien naturel qui se fait avec la principauté ou avec ses codes. Parce qu'en définitive, ce sont nos valeurs.
Y a-t-il des éléments emblématiques de Monaco qui retiennent votre attention ?
Kika Prette : Il y en a eu plein, ça dépend des thématiques. Il y a deux ans, à l’occasion d’une collection, j'avais dessiné une toile de Jouy pour la déco des boutiques, avec tous les monuments, tous les endroits clés de Monaco : il y avait le Yacht-Club, le Rocher, la Place du Casino... Il y a toujours un rappel de cette identité monégasque dans ce que l'on fait. De même, concernant les shootings, c'est une évidence de les faire à Monaco ! Que ce soit dans les collections elles-mêmes, ou dans leur design, leur accompagnement, Monaco est toujours très, très présente.
Quelques exemples de shootings qui vous ont particulièrement marqués ?
Kika Prette : On travaille main dans la main avec la Société des Bains de Mer, et on en est très fiers. Cela fait partie de la marque. Il y a quelques années, on nous a ouvert les Salons privés du Casino Monte-Carlo pour un shooting avec Chiara Ferragni, dont le rendu est superbe, les photos sont très belles. On a également reshooté la partie VIP, qui est aussi splendide, avec Thylane Blondeau et Baptiste Giabiconi. Et on a maintes fois eu accès à l'Hôtel de Paris Monte-Carlo, à l'Hôtel Hermitage Monte-Carlo et au Monte-Carlo Beach Club...
Un autre paysage monégasque qui vous inspire ?
Kika Prette : La Place du Casino, même si l’on tombe un peu dans le cliché, c’est vrai que c'est toujours très, très beau. Après, il y a aussi tous les plans d'eau typiques de Monaco. Notre dernier shooting, avec Eva Longoria, a eu lieu à l'Hôtel Hermitage Monte-Carlo qui nous a notamment donné accès à une suite avec vue sur le port et la montée du Palais princier... Cela nous a permis de résoudre une difficulté particulière : à savoir que, selon le type d'égérie avec qui l’on travaille, les endroits publics peuvent être assez difficiles à prendre pour cadre. On a également fait une superbe campagne avec Thylane et Baptiste, pour la collection des 40 ans, la collection YUMMY, sur la jetée, la digue, avec la mer en arrière-plan. On a fait aussi des visuels avec Charles Leclerc là-bas. Cette vision méditerranéenne, c'est tout simplement magique. On dispose de lieux sublimes, autant en tirer parti !
Parmi vos égéries, on compte Charles Leclerc, le célèbre pilote et champion de Formule 1, que vous venez de citer. Comment avez-vous fait le lien entre son univers et le vôtre, qui pourraient, a priori, paraître assez éloignés l’un de l’autre ?
Kika Prette : Quand on vient de Monaco, on grandit avec le Grand Prix ! Même à l'école, on est plongé dans cette atmosphère, puisque toute la ville se retrouve bloquée pour l’occasion. En tant que marque monégasque, il était donc doublement naturel pour nous de collaborer avec Charles (qui, lui aussi, est né à Monaco), comme ambassadeur et égérie. Par ailleurs, cela correspond également à notre volonté de décloisonnement du bijou à travers nos collections unisexes : les hommes portent de plus en plus de bijoux, et non plus seulement des bracelets en cuir. Nous sommes très fiers de collaborer avec Charles, tout comme avec l’AS Monaco, car ce sont d’immenses sportifs, auxquels nos collections vont à merveille. Et ce qui est peut-être plus important encore, c'est qu’à travers ces collaborations, on arrive à communiquer nos valeurs, des valeurs saines que sont les valeurs du sport. Finalement, pour nous comme pour lui, cela s'est imposé comme une évidence.
En vous entendant parler, on sent une proximité, une certaine affinité avec vos égéries...
Kika Prette : Oui, on parle de collaboration, mais en définitive, c'est un processus naturel. Charles Leclerc fait partie de la famille APM. D'abord, c'est un pur bonheur de travailler avec lui, c'est quelqu'un d’extrêmement professionnel, très précis, très sérieux ; et en plus, il est adorable. De toute façon, je privilégie cela, cette proximité, cette fidélité avec tous nos partenaires et collaborateurs : je garde toujours les mêmes personnes autour de moi, les mêmes photographes, la même équipe vidéo... J'aime pouvoir travailler dans la continuité et créer quelque chose de fort avec mes équipes, au-delà du simple travail... Quand on se retrouve sur les shootings, toutes les six ou sept semaines, on est tellement contents de se voir ! C'est une famille élargie, en réalité.
En tant que directrice artistique, comment analysez-vous l’émergence de nouvelles tendances ?
Kika Prette : Les tendances, ça vient beaucoup de la mode au sens large, de ce qui est dans l'air du temps. On suit donc beaucoup les actualités, pas uniquement celles de la mode, mais aussi celles des artistes... Parfois, ça peut simplement être une couleur. Par exemple, l’une des dernières couleurs tendance, ça a été le fuchsia. Il y avait du fuchsia partout, il y a quelques mois. Et derrière, avec le film Barbie de Greta Gerwig, on est évidemment retombé sur le rose. Quand on voit naître une tendance aussi massive pour une couleur, il faut en tenir compte : ça fait partie de notre travail. Mais il faut surtout la transformer, se l’approprier pour la rendre cohérente avec APM, cohérente avec la collection sur laquelle on est en train de travailler. Avoir un univers où cette tendance s'inscrit naturellement.
Vos sources d’inspiration ?
Kika Prette : Ça peut venir de plusieurs choses. D'un voyage, d'une tendance du monde de la mode, mais aussi de moments simples du quotidien. Par exemple, j'avais sorti il y a cinq ou six ans une collection s'appelait Wonderland, qui a fait un carton tout à fait inattendu. À l'époque, mon fils avait trois ans, il était obsédé par les dinosaures, il y en avait partout à la maison. Et donc... j'ai fait une collection avec des dinosaures ! Là, mon mari m'a dit : « Franchement, t'es sûre ? Parce que... qui va vouloir porter des dinosaures ?! » Mais en fait, ça se retrouvait dans l’air du temps... Il y avait eu un Jurassic World au cinéma, et on s’est mis à avoir des dinosaures un peu partout, dans la pub, et même dans la mode : certaines marques ont sorti des pulls, des tee-shirts avec des dinosaures. C'était aussi la période de Game of Thrones, avec cette tendance « dragons ». Et donc, j’ai suivi mon intuition. Par exemple, j'ai dessiné un rexy pour une grosse boucle d'oreille verte. Quand on l’a sortie, on l'a placée sur nos influenceurs, lors de nos événements. Et là, tout s’est emballé : cette grosse boucle d'oreille verte ne touchait pas les vitrines ! Même moi, j'étais surprise pour être honnête, parce que ça partait d'un clin d'œil à mon fils, à sa passion pour les dinosaures... je n’imaginais pas un tel succès.
En termes de fabrication, y a-t-il des matériaux que vous privilégiez ?
Kika Prette : On est majoritairement sur de l'argent recyclé, des zircons, des oxydes de zirconium, ou des perles de culture, des pierres dures comme la turquoise, la malachite.
Pourquoi cette volonté de rester sur ces deux matériaux-là essentiellement ?
Kika Prette : Cela tient à l’histoire de la marque. La marque APM Monaco existe depuis onze ans, mais mon mari a lancé la société fabricant de bijoux, il y a quarante ans, avec sa mère. C’était une activité de B-to-B. Ils faisaient tous les salons du bijou international : Vicenza, Bâle, Hong Kong, Vegas... Quand j'ai connu mon mari, en l’accompagnant sur ces salons, je voyais tous ces plateaux de bijoux très répétitifs. On s'est donc demandé : « Pourquoi ne pas faire une collection en argent, tout simplement, avec un fini qui tende vers la joaillerie très haut de gamme ? On avait déjà le savoir-faire sur l'or et sur les pierres précieuses. On a conservé exactement la même façon de procéder en fabrication, avec des bijoux sertis à la main : on a remplacé l’or par l'argent, et les diamants par les zircons. On a juste remplacé les matières premières et le rendu est bluffant parce que la façon de travailler les bijoux, c'est de la joaillerie, un artisanat très haut de gamme.
Et quand les premières collections sont sorties ?
Kika Prette : Les gens n’y croyaient pas, ils disaient : « Attendez ! Ça, c'est de l'or et des diamants, ce n'est pas possible autrement. » Et la question qui vient immédiatement après, c’est celle du prix. Chez nous, le panier moyen est à environ 100 ou 120 €. On a aussi de plus grosses pièces qui montent à 500, 600, 700 €. Mais on reste très loin des prix de la haute joaillerie. C'est de là qu'est parti le concept de la marque : un rendu joaillerie, très qualitatif, avec des magasins de luxe, de très beaux matériaux, de splendides emplacements, un service très haut de gamme, où l’on peut s'installer pour essayer un bijou, où l’on vous offre un café, avec du bon son, Et, en même temps, des produits qui restent « abordables », parce que ce qui compte, c’est quand même avant tout de se faire plaisir !
Vous venez de mentionner que tous vos bijoux sont sertis à la main : à cet égard, quelle part l'artisanat d'art représente-t-il dans les créations d'APM ?
Kika Prette : Une part énorme. Le savoir-faire que nos équipes est vraiment remarquable. Il témoigne de quarante années d'expérience, dans des métiers très spécifiques. Quand je dis que tout est serti à la main, il faut préciser qu’il s’agit d’une micro-sertie au microscope : chaque pierre une par une. Ce sont vraiment de grands artisans du bijou et de la joaillerie. C’est un travail qui ne s'improvise pas. Et un véritable engagement.
En termes d’engagement, justement, comment APM Monaco prend-elle en compte les enjeux de durabilité, de responsabilité sociale, dans la conception et la fabrication de ses bijoux ?
Kika Prette : Alors, c’est une question importante, on ne peut l’ignorer. À titre individuel, on fait tous des efforts. Mais en tant qu’entreprise, surtout quand on a des outils de production, il faut être conscient de la nécessité de trouver des solutions durables. Pour moi, il y a deux choses à ce niveau-là : le côté client et le côté interne. Et l'un ne voit pas l'autre.
En termes de production, il y a beaucoup de choses qu'on fait sur nos sites de production. Toutes les eaux de pluie sont récupérées, ainsi que les eaux des climatisations. On a des panneaux solaires pour récupérer de l'énergie... On essaye de trouver tout ce qu'il est possible de faire pour gaspiller moins. Par rapport au plastique, cela fait déjà des années qu'on est complètement passés à des matériaux compostables, recyclables. Même dans nos usines, on essaye vraiment d'éliminer complètement le plastique mono-usage.
Et côté client ?
Kika Prette : C’est une autre forme d’engagement qui consiste à mettre l’accent sur nos propositionsde bijoux en argent recyclé. “Profitez aujourd’hui tout en respectant demain”, telle est la devise de notre programme Wonderland . En rapportant d’anciens bijoux APM dont le client ne veut plus - parce que la mode a changé, parce qu’il a envie de nouveauté, il obtient un pourcentage de la valeur de son achat initial, qu'il peut utiliser pour s’offrir autre chose. Il bénéficie d'une garantie, d'un nettoyage professionnel et d'une réparation à vie de ses bijoux.
Une dernière question : un bijou coup de coeur parmi toutes les collections que vous avez créées pour APM Monaco ?
Kika Prette : C’est une question qu’on me pose très souvent. Et, à chaque fois, je réponds : c'est comme me demander, de mes enfants, lequel je préfère ! Concrètement, je suis incapable de donner naissance à une idée ou de créer, de dessiner quelque chose qui ne me plaît pas. À mes yeux, l’un des moments les plus excitants, parmi tous ceux que je vis en tant que directrice artistique, c'est vraiment le début d'une collection : celui où l’on imagine une thématique, où l'on se dit qu'on doit allumer une nouvelle flamme, trouver une nouvelle idée... Faire des recherches, c’est ce qui me plaît le plus, comme un puzzle qui, tout doucement, prend forme, jusqu’à ce qu’on se dise : « Ah, voilà, ça y est, je l'ai : j’ai mon moodboard, j'ai envie d'avoir ce genre de collection. » Et à partir de là, on décline les bijoux, les designs et l’on va beaucoup plus loin. Ensuite, l’autre moment formidablement excitant, c'est quand les échantillons sortent, lorsque les plateaux arrivent avec mes bijoux : j'ai envie de les essayer, de les toucher, avec cette joie d’avoir donné naissance à quelque chose. Alors, vous dire quel serait mon bijou préféré, c'est très, très difficile... Peut-être vous répondrai-je simplement : le prochain.
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